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J'ai un prénom et un nom maintenant.

Je m'appelle Peter Aschenberner .

Je ne suis plus considéré comme une bête de cheptel, désormais.

 

Néanmoins, l'encre baveuse incrustée sur mon avant-bras malingre me ramène à l'état d'animal dans lequel je me trouvais à Auschwitz.

160805, à jamais, sur ma peau.

160805, à jamais, mon identité.

 

La guerre est finie sur nos terres, mais elle n'a jamais cessé en moi. Que dire, si ce n'est que les gens extérieurs ne parlent pas notre langue, nous juifs terrassés par les coups et les sévices que nous ont fait subir les nazis. Ils me parlent, mais nous sommes comme deux êtres d'univers différents. Ils se postent face à moi et me demandent « Comment se déroulait une journée au camp? ». Que puis-je répondre à ces jovials personnages ? Une journée là-bas était si noire, si longue, si terrible, tellement de « si » qui font d'une journée à Auschwitz un contexte indescriptible.
 

Je leur ferai fondre le cœur en une flaque de dégoût et d'horreur, pourtant ils ne pourront jamais imaginer ce que nous autres, avons vécu, même si je leur racontais.
 

Il n'y pas de mots pour décrire les cris des femmes qui retiennent leurs enfants, enfants qui seront emmenés dans les wagons et qui seront exterminés.
 

Il n'y pas de mots pour réaliser comme le froid hivernal dans lequel nous travaillions nous brisait les côtes, nous brûlait les yeux, les bras, les pieds.
 

Il n'y a pas de mot assez fort, assez puissant, pour faire comprendre à un Homme ô combien son semblable est cruel.
 

 

Il n'y aura jamais de mot assez pénible pour vous montrer, parce que jamais vous ne l'avez vécue, parce que jamais vous n'avez connu telle horreur.


Mais surtout, il n'y aura jamais assez de mots pour vous dire, à vous, combien un Homme tient à son identité, à sa vie, à sa santé mentale.

Il n'y aura jamais assez de mots pour vous faire imaginer la manière vicieuse dont il nous ont dépecés de ces choses-là.

 

Imane Moktaa

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