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-Quel contraste saisissant !
Fräulein Dietz, les mains jointes sur la poitrine et les yeux pétillants dévorait nos petits chefs-d’œuvre des yeux.

 

-Oh ! Il faut que je le montre à Frau Gretchen, elle va adorer ! Peter, va nous la chercher je te prie !

 

D'un mouvement de la main, elle encouragea le petit et menu Peter à quitter la salle de classe pour chercher l'institutrice de la salle d'en face. Une vingtaine de dessins colorés s'étalaient sur notre mur gris et froid, et je ne pus qu'opiner du chef. Oui, quel contraste frappant !


Ces dessins étaient comme un parterre de fleurs vives et gorgées de couleurs pétillantes sur du béton sale et froid. Vingt cinq petits cœurs battaient en même temps, respirant la fierté. Selma me prit la main, une main tâchée de peinture gouache et de stylo rouge.

 

-Regarde ce que nous avons fait. Si on peut encore rêver, alors nous sommes encore vivants !

 

Sa bouche dévoila ses dents fines et pâles. Son incisive était ébréchée, je le sais parce qu'elle est tombée hier après la répétition de l'opéra.

Nos petites mains étaient enlacées et nous les regardions avec une certaine joie discrète, un contentement paisible. Un sourire flottait sur mes lèvres.


C'était ma dernière journée à Terezin, parce que le lendemain la Croix Rouge s'en est allée

et j'ai été déporté.

 

La dernière fois où j'ai fermé les yeux, et le dernier mot que j'ai soufflé était adressé à Selma et aux institutrices. Mais pas à Terezin.
 


«Merci.»
Imane Moktaa

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